Vers une sobriété numérique heureuse ? Prolégomènes

L’@nnexe fait sa COP21 ! En marge de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques, qui se prépare dans l’angoisse d’un fiasco, nous diffuserons régulièrement sur notre blog le travail que nous menons sur la nécessaire prise de conscience que le numérique – et les industries et les technologies qui le porte – est un incroyable vecteur de pollutions dans le monde, de désintégrations sociales et environnementales sur des territoires souvent loin de l’Occident (donc invisibles) et de troubles sanitaires majeurs pour des populations déjà fortement abîmées et précarisées. C’est le côté pas sexy des nouvelles technos, la réalité ni cool ni virtuelle pour celles et ceux qui la subissent. C’est ce qu’on trouve régulièrement exprimé sous la forme de « la face cachée du numérique« .

Le numérique est-il propre ?

La question « le numérique est-il propre ?« , nous la posons souvent à nos usagers et stagiaires qui viennent à l’@nnexe et que nous rencontrons lors d’ateliers et de conférences extérieures auxquels nous participons[1].  Nous nous la posons aussi à nous-mêmes. Pour tout dire, elle nous obsède. Car elle nous place dans une position bien inconfortable, nous les médiateurs numériques. Notre travail est de faciliter les usages du numérique auprès des publics les moins familiers avec les TIC. Cela fait-il de nous des évangélisateurs du numérique ? Certes non. Nous pensons que nous avons, nous aussi, la capacité de porter un regard critique sur la révolution numérique et technologique qui est en marche. D’aucuns, dont nous sommes à l’@nnexe, pensent que nous ne devons pas être des chantres du numérique, mais des montreurs et des décrypteurs, des agitateurs capables de susciter la réflexion et le questionnement sur ce qui nous est proposé sur Internet, dans le débat public et sur les innombrables lieux de vente et de promotion des outils numériques.
Une injonction paradoxale point immédiatement : nous aidons à l’utilisation du numérique alors que nous connaissons l’entropie qu’il génère. Comment préconiser un aliment quand on sait qu’il comporte des substances toxiques ? Alors quoi faire ? Quoi répondre ? Usage ou non usage ? Où se situer ? Comment trouver une voix juste et sage ne prônant ni la promotion ni  le refus ? C’est toute la complexité lorsqu’on ne veut pas se laisser enfermer dans un discours bien binaire et réducteur de « pour ou contre », « bien ou mal »… beaucoup plus simple à gérer sur le plan de la communication, le confort mental, les petits intérêts et le fond de commerce à défendre.
C’est donc dans cette tension que nous voulons initier notre nouvelle série « Vers une sobriété numérique heureuse ?« . Cette interrogation, – posée, nous semble-t-il, sous forme d’oxymore -, alimentera notre réflexion au long cours pour déboucher sur une sorte de guide : ce que nous nommons, pour le clin d’œil, un eco libris du numérique.

Une série grand public

L’histoire que nous allons vous raconter dans cette saga est déjà connue d’un certains nombre de personnes sensibilisées à la nécessaire sobriété dans le champ informatique et numérique. Vous savez comme à l’@nnexe nous aimons nous intéresser aux pourquoi des comment, aux coulisses de notre réalité (physique et virtuelle), au décorticage des pensées uniques et des discours tout faits, surtout en matière de numérique. Ceux qui nous fréquentent et suivent nos cours et ateliers savent que nous ne sommes pas des techno-béats et que faire marcher son esprit critique dans le monde merveilleux des octets n’est pas une mince affaire tant la fascination des machines et des technologies est grande.
Nous prions donc nos aimables lecteurs avisés, libristes, hackers, informaticiens de l’ancienne école, philosophes des sciences et des techniques, chercheurs et journalistes en tous genres ne versant pas dans l’orthodoxie du progrès, citoyens fouineurs et éclairés… de lire cette série du coin de l’œil et de ne s’arrêter que sur les points qui leur sembleront nouveaux. Leur avis et analyses d’experts seront évidemment appréciés pour corriger ici un chiffre, là une donnée ou là encore un paramètre technique. Car, déformation de l’éduc pop oblige, notre saga entend s’adresser, en premier lieu, au plus grand nombre ; à la majorité silencieuse, comme on dit, mais qui consomme du numérique en masse.
Il fut un temps – que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître ! – où les mémoires étaient faibles, les capacités de stockage rares et chères, les équipements peu abondants et… l’imagination et la sagesse au pouvoir dans le domaine de la programmation et du déploiement de solutions matérielles et logicielles. Aujourd’hui, où le quick and dirty associé à l’obsolescence programmée dominent, tout est fait pour consommer sans modération du numérique avec tout l’appareillage qui va avec.
Acquérir des réflexes et des gestes plus responsables, des pratiques et des alternatives plus sobres et plus respectueuses de tous les environnements (minéraux, végétaux, animaux et humains) telles sont les motivations de ce travail. Notre volonté est de partager notre expérience et de montrer que l’action est à la portée de toutes et tous ; elle n’est pas réservée à une petite frange d’initiés ou de militants survitaminés.
Quelle belle occasion de lancer notre série pendant la COP21 ! Nous espérons qu’elle vous plaira et qu’elle suscitera des réactions et des commentaires servant à enrichir le débat fort complexe autour de la sobriété énergétique. Alors, COP ou pas COP pour devenir des écolibristes ?

Notes :
[1] Nous avons notamment organisé le 13 juin dernier, un atelier consacré au gaspillage et aux déchets de l’industrie numérique pendant le week-end Italia Sostenibile sur la place Henri Frenay et, le même jour, une conférence pour la journée du libre de Vincennes avec nos amis et partenaires Antanak.

4 réflexions sur “Vers une sobriété numérique heureuse ? Prolégomènes

  • 17 novembre 2015 à 14 h 56 min
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    Certes, les outils informatiques et numériques engendrent des déchets vecteur de pollutions, mais ils sont utiles et indispensables pour le bon fonctionnement de la vie quotidienne des êtres humains. Imaginez un peu, que feront sans la numérique?

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    • 17 novembre 2015 à 17 h 58 min
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      Bonjour, merci de votre commentaire.

      Il est tout à fait compréhensible que vous défendiez votre fonds de commerce (le cloud computing).
      La question n’est pas (dixit) « que feront sans la numérique? » (c’est bon de se relire), mais comment faire pour que les industries du numérique soient capables (comme d’autres industries l’ont déjà fait) de réduire sensiblement leurs impacts sur l’environnement, d’arrêter les conflits liés à l’accès aux ressources indispensables pour la fabrication des appareils électroniques (cf les mines de coltan en RDC, mais les exemples de ce type abondent), d’organiser en amont et en aval le reconditionnement et le retraitement des déchets afin de limiter les pollutions et les impacts sanitaires sur les populations vivant à proximité des lieux de stockage et de traitement ?
      Autre question qui touche le consommateur : comment limiter les effets de l’obsolescence programmée (changement de matériel très régulièrement) et comment ne pas verser dans le tout numérique ?
      La vie et les échanges semblent désormais graviter essentiellement autour du numérique. Est-ce une réelle avancée ? Le numérique facilite-t-il autant nos vies ? La somme des heures consacrées à la prise en main, à l’utilisation et à la maintenance des outils numériques pourrait-elle être réinvestie dans d’autres activités ? Ces questions restent ouvertes.
      Pour le cloud computing, je conseille de se pencher sur une nouvelle discipline : le Green IT. Elle vous concerne directement. Adopter des bonnes pratiques pour limiter les dépenses d’électricité des data centers devient un nouvel argument de vente pour vos clients. Pensez-y.

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  • 24 novembre 2015 à 5 h 22 min
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    Comme je l’ai déjà dit, les outils informatiques et numériques engendrent des déchets vecteur de pollutions, mais ils sont vraiment important pour le développement d’un pays. Il est certain qu’un monde sans informatique, ni numérique ne fonctionnera pas normalement.

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